LE CAS AIRBUS GROUP
Frédéric SUTTER est intervenu à l'occasion de la Conférence-débat organisée en partenariat avec l'association Minerve, organisée le 21 janvier 2016.
EXTRAITS:
"Les technologies numériques sont de véritables technologies de rupture. Leur impact sur nos modèles économiques est absolument considérable, nous demandant de bousculer nos paradigmes et d’inventer de nouveaux process. Explosion de la puissance de calcul, explosion du nombre d’utilisateurs connectés et explosion du nombre d’outils communicants: pour un groupe comme le notre, il s’agit de savoir comment exploiter ces opportunités dans un but industriel. Quand on pense que seulement 1% des données sont utilisées hors du process par lequel elles ont été générées, on réalise que les opportunités sont encore immenses. Plus on maitrise les données, plus on maitrise les ruptures et les opportunités: à nous de mettre en place les évolutions en terme de technologie, d’organisation, de management et d’intelligence économique.
La digitalisation est une déjà réalité pour Airbus Group, que ce soit avec nos clients, avec nos fournisseurs ou en interne. Mais notre évolution doit être permanente, nous devons évoluer avec notre environnement où émergent de nouveaux potentiels concurrents. Prenons l’exemple de Google: ils travaillent sur de nombreuses de plateformes qui peuvent venir nous concurrencer. En terme de sécurité et de défense, il peuvent offrir un service de cybersécurité et augmenter leur chaine de valeur. Il s’agit donc d’être conscients de ce qui se passe hors des écosystèmes traditionnels. Des groupes comme Google possèdent la technologie, la créativité, l’agilité, la masse monétaire: ils ont la puissance, quelque soit le domaine économique. Ils travaillent sur des facteurs multiplicatifs: multiplication des utilisateurs, multiplication des données.
Nous veillons donc de manière constante à l’amélioration de nos offres existantes et à la maitrise de technologies clés, en développant de nouveaux projets.
Nous avons par exemple développer l’E-fan, un avion à propulsion électrique biplace au cockpit connecté, qui a effectué sa première traversée de la Manche l’été dernier, en 2015. L’E-fan a été présenté au Bourget à Eric Schmidt, CEO de Google, qui s’est montré très enthousiaste. Le principe de l’E-fan est de proposer une tablette (intégrant notamment le plan de vol) à plugger dans le cockpit. Cette tablette permet ensuite de comparer le plan de vol théorique et le plan de vol effectué. L’E-fan sera mis en production et livré en 2017
Une autre grande innovation concerne l’impression 3D, qui est un outil passionnant en terme de production et de design. Nous utilisons déjà de nombreuses pièces imprimées en 3D, dans les A350 par exemple, ainsi que dans la fournitures de pièces détachées. Aujourd’hui, plusieurs tonnes d’éléments 3D sont en vol, et ce n’est que le démarrage!
L’outil MIRA (Mixed reality application) est également un beau succès. Il permet au personnel chargé du contrôle du matériel des avions de visualiser sur une tablette une vidéo mélangeant images réelles et images issues de la maquette numérique de l’avion. Les éléments à vérifier sont affichés en orange.
Egalement, nous travaillons l’innovation de rupture dans les business models, avec Airbus Bizlab, projet qui s’inspire de l’uberisation. L’enjeu est de tester cette nouvelle offre économique.
Il va sans dire que toutes ces innovations demandent une adaptation de la culture d’entreprise et de son système de ressources humaines, qui est un accompagnateur fondamental de ces évolutions. Le recrutement est élargi: aujourdh’ui, Airbus défense et Space recrute par exemple chez SpaceX, ce qui nous permet de développer une nouvelle dynamique culturelle. Pour ceux qui travaillent déjà chez Airbus, des process de formation et d’accompagnement sont proposés. Un exemple est le « Passeport Digital »: un outil de sensibilisation composé de 160 video en 4 langues, disponible sur l’intranet. En 10 jours, plus de 6000 salariés s’y étaient connectés! Nous travaillons également à de nouveaux modèles de leadership, plus orienté projet et travail collaboratif: notre capacité à travailler ensemble doit être revue. De nouveaux outils accompagnent cette transformation de culture, notamment le réseau social d’entreprise (40% des salariés y sont actifs).
Le défi du numérique est donc pleinement intégré par Airbus. Notre groupe reste fidèle à lui-même, il ne change pas son business modèle, mais développe en parallèle de nouveaux business modèles, pour compléter son coeur de métier par de nouvelles offres."
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