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Nous trompons-nous de regard sur l’Afrique ? par Antoine Pouillieute

760 km séparent Alger de Marseille, 150 km la Tunisie de la Sicile et 15 km le Nord marocain du Sud espagnol.

L’Afrique est à nos portes. Elle l’est depuis toujours même si, des siècles durant, sa connaissance ne dépassa guère les côtes carthaginoises d’où soufflait Africus, le vent annonciateur des pluies. Elle s’aventura parfois jusqu’aux marches de Nubie voire d’Abyssinie mais, longtemps, ce fut tout. Pourtant, sa proximité d’avec l’Europe n’a jamais été aussi vive qu’aujourd’hui au point de troubler parfois notre vision. En effet et de façon lancinante, l’opinion balance entre un afro-pessimisme abyssal et un afro-optimisme séraphique. C’est que, pour beaucoup, l’Afrique demeure encore le « continent noir » – c’est-à-dire le continent inconnu – apparaissant tantôt comme une menace ou un espoir, un abîme ou un avenir, une détresse ou une promesse.

Quel regard portons-nous sur l’Afrique ? Comment évolue-t-on de la mission civile de la France, théorisée en 1885 par Jules Ferry, à la Zone continentale de libre-échange (ZLEC), lancée en 2018 par l’Union africaine à l’initiative du Rwanda ? Comment passe-t-on de la trilogie « colons-militaires-missionnaires » au tréfonds du parti colonial au triptyque « société civile-solidarité internationale-objectifs multilatéraux » à la pointe du combat en faveur du développement durable ?

Apporter une réponse à ces questions réclame une évaluation honnête du regard que nous portons nous-mêmes sur l’Afrique.

Bien que plus large et diverse, l’histoire coloniale de la France se réduit souvent à l’Afrique. Pourquoi ? Parce qu’en 1940, notre empire s’étendait sur 12M km2 peuplés par 70M d’habitants – la métropole en comptait alors 40M – et parce que 90% de ces territoires et 60% de ces populations se situaient précisément en Afrique occidentale et équatoriale : d’où cette vision quelque peu rétrécie.

Par ailleurs, une fois la Seconde guerre mondiale achevée et la guerre froide installée, « A Wind of Change » souffla sur les empires, selon l’expression utilisée par Harold Macmillan en février 1960. Ce fut alors le temps des indépendances. A l’exception notoire de l’Indochine et de l’Afrique du Nord, l’accession des colonies françaises à l’indépendance suivit ensuite, et pour l’essentiel, le processus organisé par les dispositions du titre XII de la Constitution d’octobre 1958 instituant la Communauté française, dispositions qui ne seront abrogées qu’en août 1995…

On connait la suite : l’édification hâtive d’états-nations par le placage d’institutions importées ; des économies de rente accumulant un endettement aggravé par la dépréciation des termes de l’échange ; un ajustement structurel sévère avec son cortège de crises politiques et sociales ; enfin, une insertion plutôt prometteuse dans la mondialisation sur un créneau encore médiocre dans les chaines de valeur, mais plaçant l’Afrique dans le droit commun de la communauté internationale plutôt que de la maintenir au nombre de ses exceptions permanentes.


Par dilection historique, considérons-nous l’Afrique pour ce qu’elle est vraiment ou bien pour ce que l’on aurait aimé qu’elle fût ? Nous trompons-nous de regard sur elle ? « Il n’y a pas de politique qui vaille en dehors des réalités » affirmait le général de Gaulle. Soyons donc avant tout lucides sur nous-mêmes et :

Convenons qu’à bien des égards, nous nous trompons souvent de regard sur l’Afrique réelle… (I) ;… même si nous nous tromperions davantage encore en étant aveugles face à des fragilités qui, par-delà l’Afrique, nous affectent aussi (II).

Mon propos s’en tiendra à l’analyse : il n’a aucune prétention à suggérer une autre politique, une autre doctrine ou une autre coopération. Tout au plus certaines conclusions tirées de l’analyse feront-elles ressortir quelques pistes susceptibles d’éclairer l’action envers ce continent voisin où se joue aussi une part de notre propre destin.


I - Nous nous trompons souvent de regard sur l’Afrique réelle

J’illustrerai ce constat par la géographie, le développement humain, l’économie et la gouvernance.


- L’Afrique est un continent

Comme au temps de l’École nationale de la France d’outre-mer (ENFOM), nous découpons toujours les 54 états du continent africain en larges bandes horizontales : des régions arabo-berbères à l’espace levantin au Nord ; puis, l’Afrique australe et lusophone au Sud ; enfin et au milieu, l’Afrique sub-saharienne avec son adret francophone à bâbord et son ubac anglophone à tribord.

C’est là une approche toujours répandue, qui a pour conséquence de nier l’existence même de l’Afrique en tant que continent pour des raisons ne dépassant pas l’histoire de la fin du XIXème siècle alors que l’Afrique plonge ses racines au tréfonds l’histoire de l’humanité. Pour autant, cette vision perdure. A ce jour, en effet, aucune statistique ne fournit officiellement le PIB global de l’Afrique comme cela existe, par exemple, pour l’Union européenne ou pour l’Asie. Une estimation évalue le PIB africain à l’égal de celui de la France – soit 2.800Mds $ pour 2018. Or, se réjouir de ce que l’Afrique progresse ou bien dire que son PIB équivaut à celui de la 7ème économie mondiale : ce n’est pas tout à fait la même chose et le message émis est pour le moins différent.

D’ailleurs, s’il fallait esquisser les axes géographiques structurant l’Afrique de demain, la segmentation verticale récemment proposée par Rémy Rioux semblerait plus pertinente. A la proue du continent s’imposerait la locomotive sud-africaine, qui tire tout le développement austral de l’Afrique, et bien au-delà : le PIB/hab. de l’Afrique du Sud est à ce jour le double de celui du Maroc. Puis, s’organiserait la verticale de l’ouest se structurant de Tanger au Cameroun sous l’impulsion de la diplomatie chérifienne. Ensuite, la verticale nilotique – articulée autour du Nil – d’Alexandrie à Nairobi sous l’impulsion, notamment, de la diplomatie éthiopienne. Enfin, au centre, la verticale des territoires enclavés allant de Tamanrasset à Harare où se concentreraient toutes les vulnérabilités et, par suite, tous les dangers.

Enfin, rangeons au magasin des accessoires quelques tenaces idées reçues. Ainsi, les anciennes puissances coloniales disposeraient-elle aux Nations Unies d’une clientèle d’obligés parmi leurs anciennes possessions : une rapide analyse des votes exprimés lors de la dernière assemblée générale de l’organisation new-yorkaise, au début de ce mois, prouverait, si nécessaire, qu’il n’en est plus rien. De même bénéficieraient-elles de « chasses gardées » pour leurs entreprises : ce fut sans doute vrai puisque certaines en usèrent voire en abusèrent. Mais désormais, les entreprises remportent les marchés de par leurs mérites et non de par leur nationalité. C’est d’ailleurs bien ce qu’elles revendiquent elles-mêmes lorsqu’elles se développent hors de ces prétendues « chasses gardées ».

Quoiqu’il en soit, l’Afrique se vit désormais comme un continent et le regard que nous portons sur elle doit être ajusté afin d’intégrer cette robuste réalité : cessons de ne considérer que les bouts d’Afrique qui nous arrangent pour appréhender une réalité politique dont l’horizon légitime est continental.


- Les Africains se portent mieux

En Afrique, l’espérance de vie dépasse désormais 60 ans : 61 ans pour les hommes et 64 ans pour les femmes. Quand, depuis le début du XXIèmesiècle, l’espérance de vie augmentait de 5 ans dans le monde, elle bondissait de 10 ans en Afrique. L’écart d’espérance de vie entre les pays développés et les pays en développement est donc en train de se réduire du tiers. La pauvreté recule aussi de manière significative, même si l’espace subsaharien concentre encore l’essentiel des reclus sous le seuil d’extrême pauvreté, soit 2$/jour ou moins. Il reste que l’un des huit objectifs du Millénaire adopté par les Nations Unies en septembre 2000 – celui consacré à la réduction de moitié de l’extrême pauvreté d’ici à 2015 – a bel et bien été atteint en proportion, même si le nombre absolu de pauvres augmente du fait du croît démographique.

En 30 ans, la mortalité infantile a diminué de presque 20% : de 93 pour mille en 1990, elle n’est plus que de 78 pour mille, avec de fortes distorsions sur le continent puisque l’on va de 34 pour mille en Afrique du Sud à 120 pour mille au Nigeria. Des résultats décisifs ont été obtenus au Sénégal, au Congo, à Madagascar et en Érythrée. Enfin, la charge de morbidité des dix maladies les plus mortelles a diminué de moitié depuis le début du siècle.

Le taux d’alphabétisation dépasse partout 60% : en une génération, il a atteint 80% au Maroc, en Égypte, au Cameroun et au Kenya. Le taux de scolarisation, quant à lui, atteint presque 90% pour l’enseignement primaire et celui de transition entre l’enseignement primaire et l’enseignement secondaire dépasse 70%. Depuis le début du siècle, l’Afrique a doublé ses capacités d’accueil dans l’enseignement primaire et triplé celles dans le 2ème cycle de l’enseignement secondaire.

Bien sûr, tout n’est pas parfait, mais ces progrès sont suffisamment remarquables pour être soulignés puisqu’ils sont structurels. Notre regard volontiers éploré doit, là encore, s’ajuster pour saluer la valeur exemplaire des efforts accomplis et des résultats obtenus.


- L’Afrique est en forte croissance

Depuis deux décennies, la croissance africaine dépasse 5% par an : l’Afrique surperforme. Il faut, en effet, remonter à 1975 pour retrouver une croissance mondiale supérieure à ce taux. En 2018, 6 des 10 plus fortes croissances au monde ont été accomplies en Afrique : les PIB du Ghana, de l’Éthiopie, de la Côte d’Ivoire, de Djibouti, du Sénégal et de la Tanzanie ont ainsi crû entre +7 et +8,5%/an.

Beaucoup reste à faire et l’on sait quoi. Notamment, une révolution verte par laquelle la richesse agricole africaine capterait davantage de valeur ajoutée grâce à la transformation ; un effort d’investissement soutenu afin de valoriser un potentiel suffisant de croissance avec, notamment, une priorité pour les infrastructures ; la constitution d’une épargne intérieure orientée vers l’avenir, évitant ainsi aux états un nouvel endettement dégradant leur solvabilité extérieure ; une conformité plus exigeante aux normes de la vie des affaires afin d’éviter les dérives prédatrices. Pour réussir tout cela, le renouvellement des générations aidera : il faut donc l’encourager et le faciliter.

Enfin, l’Afrique se numérise à grands pas. Plusieurs réseaux de fibre optique l’encerclent déjà depuis longtemps ; 50% de la population dispose d’un téléphone cellulaire ; 30% a accès à Internet ; 25% bénéficie du haut débit… L’Afrique profite pleinement des opportunités de By-Pass – c’est-à-dire de la capacité à sauter des étapes intermédiaires – afin d’accéder directement à des technologies vis-à-vis desquelles l’Europe reste encore trop timide : télémédecine, bancarisation par téléphonie mobile, paiements numériques, microcrédit à distance, commerce en ligne ou e-administration.

Ainsi, non seulement l’Afrique est en forte croissance, mais elle est aussi en rapide numérisation : cela ne saurait échapper à notre regard.


- L’Afrique est mieux gouvernée

Nul ne peut pas prétendre que la bonne gouvernance ait jamais constitué un mantra africain.

Cela s’explique, entre autres raisons, par le fait que les indépendances ont souvent été menées par des dirigeants vite érigés en Père de la Nation, favorisant ainsi leur longévité politique. Les frontières issues de la décolonisation ont également étouffé des réalités humaines ou ethniques ouvrant la voie à une instabilité chronique. Durant la guerre froide, la lutte d’influence entre blocs se dénoua souvent en coups d’État plus ou moins violents, et plutôt plus que moins d’ailleurs. Dans les années 90, la vague des Conférences nationales censées répondre à la conditionnalité démocratique énoncée par le discours de La Baule dévoila surtout le talent des politiciens africains pour organiser des processus électoraux à seule fin d’apporter un apaisement formel à la communauté internationale. Plus récemment enfin, le State Departement américain tenta de forcer l’alternance en limitant le nombre des mandats successifs pouvant être exercés par les dirigeants africains. Bien entendu, rien de ce qui provenait de l’extérieur ne fonctionna jamais dans le sens souhaité.

Une littérature abondante fleurit d’ailleurs, qui s’interroge toujours sur la prédisposition africaine à pratiquer la démocratie au sens du Siècle des Lumières, c’est-à-dire au soutien d’un contrat social centré sur l’homme et le citoyen. Je ne souhaite pas entrer ici dans ce débat puisque, immuablement, il se conclut par le rappel du discours prononcé en novembre 1947 par Sir Winston Churchill : « La démocratie est le pire des systèmes, à l’exception des autres… »

Tenons-nous-en donc aux faits. S’il y a beaucoup à dire sur la qualité de sa gouvernance, l’Afrique paraît avoir fait le choix de l’auto-immunité pour élever ses standards en la matière. Une fois encore, l’arrivée de nouvelles générations, l’ouverture au monde et l’accélération des échanges développent et développeront des comportements plus conformes aux normes acceptées et acceptables. Une opinion publique s’épanouit aussi là où émerge une classe moyenne mieux formée et plus impatiente. Enfin, les réseaux sociaux jouent leur rôle. Bref, l’Afrique s’auto-immunise de plus en plus, et c’est très bien ainsi.

Chaque année, la Fondation Mo Ibrahim publie un Index of African Governance (IIAG) fondé sur une centaine d’indicateurs appliqués à l’ensemble des états africains. Ils traitent de l’état de droit, des droits civils et civiques, de l’environnement économique ainsi que du développement humain. Or, cet index montre que, sur 10 ans, 70% des états ont amélioré leur gouvernance et que, sur les 5 dernières années, 33% d’entre eux représentant 60% de la population continentale, ont consolidé leurs acquis. A l’inverse, 20% des pays n’ont pas amélioré leurs performances. Pour n’être pas suffisante, il y a là une tendance qui est néanmoins encourageante puisque, sur la durée, elle est notoirement orientée dans le bon sens.

Soulignons enfin un autre phénomène d’importance : bien des dossiers ont été réglés au-dessus de l’échelon des états-nations. Les processus d’intégration régionale ont permis de définir et de mener des politiques communes dans des domaines aussi essentiels que la monnaie, le commerce, les infrastructures, l’énergie ou le droit commercial. Le « Marché commun africain » progresse avec la négociation sur la Zone continentale de libre échange (ZLEC). L’Afrique de l’Ouest réfléchit à une monnaie commune – « l’Eco » – rassemblant le Franc-CFA des huit membres de l’UEMOA avec sept autres devises de pays voisins, dont le naira du Nigeria. Enfin, des crises politiques aigües ont été surmontées soit dans le cadre formel de l’Union africaine, soit dans le cadre informel de l’arbitrage par les pairs, donc par les chefs d’État voisins eux-mêmes. Toute initiative permettant de trouver une solution africaine à un problème africain doit être résolument appuyée.

Il sera toujours facile de trouver ici ou là un exemple contraire mais, globalement, la qualité de la gouvernance africaine s’améliore à une époque où les démocratures illibérales fleurissent un peu partout dans le monde, et pas seulement au Sud…


Aussi, le regard que nous portons sur l’Afrique réelle doit-il être réajusté dans la mesure où il n’est dénué ni de nostalgie ni d’idées préconçues. Si la nostalgie peut être un sentiment sympathique, les préjugés, eux, doivent être combattus car ils faussent le jugement sur l’avenir. Pour autant, le regard plus positif que l’on doit porter sur l’Afrique réelle ne doit pas nous rendre aveugles aux vulnérabilités du continent. Et ceci pour une raison bien simple : c’est qu’elles deviennent des incertitudes pour nous aussi.


II - Nous nous tromperions davantage encore en méconnaissant des fragilités qui, par-delà l’Afrique, nous affectent aussi


Sans nier les atouts du continent, il faut prendre la mesure de ses fragilités. J’en traiterai quatre qui m’apparaissent essentielles : une vulnérabilité aux aléas, une conflictualité latente, un fort clivage social et une démographie mal maîtrisée.


- L’Afrique est vulnérable aux aléas

Si les progrès du continent africain sont indéniables, il en faut peu pour les ébranler.

Ainsi, l’autosuffisance alimentaire a-t-elle longtemps été obtenue par la culture vivrière locale. L’autonomie alimentaire, elle, ajoute à l’autosuffisance l’échange : à la satisfaction des besoins immédiats se greffe ainsi un excédent destiné à l’exportation. Cette évolution, louable en soi – ainsi, l’Afrique australe (SADC) bénéficie-t-elle depuis longtemps d’un système régional efficace de sécurité alimentaire –, encourage une agriculture plus intensive avec ses coûteux intrants ; elle favorise aussi la spécialisation des cultures. L’épuisement des sols qui en découle – sur un continent qui ne manque pourtant pas de terres arables – et la nécessité de mieux valoriser les échanges créent des tensions, qui se durciront à mesure de la croissance démographique, notamment de la demande urbaine. Avec 12% des calories consommées dans le monde pour 17% de sa population, l’équilibre alimentaire de l’Afrique risque de rester déficitaire pour assez longtemps encore.

Ensuite, face aux maladies épidémiques émergentes ou ré-émergentes, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) applique des Programmes généraux de travail dont le 13ème est en cours d’exécution. Sans même parler du VIH, au moins 7 épidémies ont récemment infecté la Planète : le Sras (2002), le virus H5N1 (2003), le virus H1N1 (2008), le choléra (Haïti 2010), le coronavirus Mers-Co (Moyen-Orient 2011), le virus H7N9 (2013) et, enfin, le virus Ébola (Afrique de l’Ouest 2014 + Congo et RDC 2014 et 2019). Or, c’est en Afrique qu’ont été déclarées 5 des 7 principales urgences de santé publique dont les ravages ont été amplifiés par des migrations plus intenses au sein même du continent africain. Si cette vulnérabilité est corrélée au niveau de développement et frappe plus durement les pays les plus fragiles, son coût freine, voire fige le progrès : il est humain (20.000 décès liés à Ébola), mais aussi économique (-1,5 point PIB lié au Sras en 2002).

Enfin, le réchauffement climatique constitue incontestablement la menace la plus redoutable. Il affecte la qualité des sols, la ressource hydrique, l’érosion des côtes, l’agriculture, la forêt, la pêche… sans compter les atteintes à la biodiversité et la rupture d’équilibres naturels déjà précaires. Si les engagements de l’accord de Paris de décembre 2015 étaient intégralement appliqués, les régions situées à plus ou moins 15° autour de l’équateur verraient en tout état de cause leur température augmenter d’au moins 3°. Or, chacun sait qu’il y a peu de chances que ces accords soient pleinement exécutés. En revanche, ce qui est d’ores et déjà acquis, c’est que 2 à 300M de personnes devront quitter des territoires – leurs territoires – devenus inhospitaliers.

Cette vulnérabilité aux aléas est bien connue et personne ne peut feindre de l’ignorer.


- L’Afrique demeure un continent conflictuel

Certains affirment que, non seulement le début du XXIème siècle aurait été le plus pacifique depuis 1910 voire 1840, mais aussi que les conflits contemporains seraient moins cruels que nombre d’autres fléaux. Il est vrai qu’en 1919-1920, la grippe espagnole fit plus de victimes que la Première guerre mondiale. Vrai aussi que, pour la seule année 2018, il y eut au Brésil 65.000 morts par violences urbaines quand on déplorait 20.000 tués en Syrie. Il reste qu’au-delà de cette comptabilité morbide, plus de 70 conflits secouèrent l’Afrique depuis la fin de la guerre froide en ayant impliqué plus du quart des états du continent et en ayant occis près de 5% de leur population. L’on pense, notamment, à la Somalie, au Nigeria et au Cameroun, au Tchad et au Niger, au Congo, au Soudan ou au Mali. Qu’il soit donc politiquement correct ou non de le dire, le conflit fait bel et bien partie du paysage africain.

Des raisons endogènes l’expliquent. Depuis les indépendances, des contestations culturelles, religieuses ou ethniques ont milité contre l’artificialité des états-nations afin de promouvoir des référents identitaires, communautaires ou claniques, sources de fractionnements et de divisions. Sur ce terreau perméable à la décomposition – on songe aux Touaregs, aux Peuhls, aux Dogons… – l’islamisme radical a, depuis 20 ans, moissonné d’abondantes récoltes. Si depuis le VIIème siècle, l’Afrique est une terre d’islam, avec 500M de fidèles, elle est même devenue le 2ème continent musulman au monde. Mais, après les crises d’Irak, de Libye et de Syrie, le salafisme djihadiste s’est installé dans l’immense bande sahélienne qui, sur ce point au moins, est bien une bande horizontale même si, depuis le Sahara, le terrorisme descend vers le Sud au long de la verticale des territoires enclavés. Hors Aqmi en Algérie, quelques groupes ou individus – Boko Haram, al-Shabaad, le Mujao et Iyad ad Ghali – perpétuent leurs attaques à partir, notamment, du Nigeria, de la Somalie et du Mali. La réponse militaire des opérations « Serval » et « Barkhane » touche ses limites dans des conflits asymétriques où le global se confronte au local, où les drones combattent les machettes et où le Hardware des états s’épuise face au Software de l’intégrisme. A ce jour, les bonnes réponses restent à trouver, même après l’expérience du « G5 Sahel » créé en 2015 et élargi à l’ensemble de la CEDEAO en septembre 2019 : un colloque organisé début octobre à l’UNESCO a permis de faire le point sur cette initiative originale, mais bien fragile.

Par parenthèse, l’on peut regretter le niveau opérationnel – à tout le moins perfectible – des armées africaines après pourtant plus de 60 ans de coopération militaire. La raison en est, à mes yeux, que cette assistance de bon niveau a davantage servi à garantir la stabilité du présent plutôt qu’à préparer la sécurité du futur. Mais, c’est là un autre débat…

L’Afrique est aussi le continent où la conflictualité emprunte des formes inédites. L’on se souvient du général Pierre Gallois prêchant en 1956 les vertus d’une force de frappe fondée sur « la dissuasion du faible au fort ». Nolens volens, d’aucuns théorisent désormais « la puissance de la faiblesse » en observant qu’en Afrique, la conflictualité n’est plus territorialisée, n’oppose plus des armées ou des états, produit une violence diffuse, n’épargne personne, se déploie par rhizomes et que, ce faisant, elle se révèle d’une redoutable toxicité : il y a vraiment là matière à réflexion.

Enfin, par-delà le conflit interne, la convoitise externe peut aussi ébranler la stabilité du continent. L’on pense à la Russie qui a engagé un grand retour en Afrique depuis décembre 2017, date à laquelle l’ONU leva l’embargo sur les ventes d’armes à la Centrafrique. Moscou organisera d’ailleurs les 23 et 24 octobre prochains un Forum économique Russie-Afrique à Sotchi. Mais, l’on pense surtout à l’entrisme de la Chine qui, avec les récents retournements de São-Tomé et du Burkina Faso, est parvenue à éliminer tout soutien africain à Taïwan hors celui du roi du Swaziland ! La Chine agit à proportion de sa puissance : en 2017, elle a importé 75Mds$ d’Afrique, y a exporté 95Mds$ et a promis 60Mds$ d’investissements directs supplémentaires. Comme toute offensive de charme, cette séduction contient sa dose d’élixir et sa dose de venin. L’élixir : c’est que ce qui est proposé consiste en des réalisations « clés en main » répondant à des besoins immédiats. Le venin : c’est que ces offres addictives provoquent la dépendance et font replonger des états plutôt assainis financièrement dans le ré-endettement : en-dehors toute procédure du FMI, la Chine porte déjà aujourd’hui plus de 14% de la dette africaine. Les objectifs sont clairs : les minerais, le bois, les matières premières, l’énergie et les infrastructures. Cette offensive – que Pékin vit comme un juste retour à meilleure fortune et un terme mis à la parenthèse occidentale – est menée à trois niveaux : une guerre commerciale qui, comme tout différend financier, trouvera une solution à force de palabres ; une guerre technologique pour laquelle la Chine déploie tous les moyens légaux et illégaux : l’hostilité manifestée à l’encontre de l’opérateur Huawei au sujet de la 5ème génération de téléphonie mobile le montre bien ; enfin, une guerre d’influence en proposant un modèle alternatif de développement fondé sur l’harmonie collective plutôt que sur la liberté individuelle. Pour des pays ayant connu le néocolonialisme, l’ajustement structurel et le consensus de Washington, cette musique est plutôt douce aux oreilles. Pourtant, la vraie question posée demeure bien : l’Empire du Milieu nourrit-il – ou non – un dessein impérialiste ? A ce jour, sa seule projection extérieure significative est la Belt & Roads Initiative (BRI) ou Nouvelles route de la soie : six routes continentales, une route arctique et une ceinture portuaire. Ce plan concerne déjà 70 pays, 35% des flux d’investissements directs étrangers et 40% du commerce mondial. Il peut sembler assez complexe de prime abord alors qu’à l’examen, il apparaît au contraire d’une grande rationalité. De surcroît, il ne préempte la place de personne car il comble un vide : celui laissé par tous les investissements n’ayant pas été réalisés auparavant. L’Afrique orientale est concernée par la ceinture portuaire grâce au port de Mombasa, au Sud du Kenya. Sauf opposition que l’on n’aperçoit pas, cette initiative aura un impact direct sur le développement oriental et austral du continent, puis indirect partout ailleurs. D’ailleurs, au nord de Mombasa, il faudrait citer également Djibouti où la Chine a, depuis 10 ans, pris le contrôle du port de Doraleh avec un accès direct au marché éthiopien par la ligne ferroviaire Djibouti/Addis-Abeba remise en état par ses entreprises.

Aussi, que les raisons soient internes ou externes, le niveau de conflictualité du continent africain reste élevé et il représente un risque substantiel sur le chemin d’un développement pérenne. Sans nourrir de prévention anxiogène, ce risque doit être évalué à sa juste mesure pour définir des stratégies de stabilité et d’apaisement.


- La société africaine reste clivée

L’on ne saurait parler ici d’archaïsme ni d’anachronisme des sociétés africaines, mais plutôt de clivage. Cohabitent, en effet, la tradition et la modernité à la recherche d’une harmonie toujours précaire. Plusieurs clivages entravent le progrès.

Tout d’abord, les anciens pèsent d’un poids excessif. Il est paradoxal de le prétendre puisque l’Afrique est un continent jeune : 65% de la population a moins de 25 ans. Mais, dans 50 ans, le croît démographique conjugué à la baisse de la mortalité quadruplera le nombre des seniors. Or, ces seniors sont déjà nés aujourd’hui : leur poids dans la pyramide des âges ne résulte donc pas d’une conjecture, mais d’une certitude. En outre, l’Afrique est un continent jeune dirigé par des vieux : l’âge médian de la population est de 20 ans lorsque l’âge moyen des dirigeants, au pouvoir comme dans l’opposition d’ailleurs, est de 63 ans, soit deux générations d’écart (contre 10 ans seulement au sein de l’Union européenne). Enfin, si le respect dû aux anciens favorise la solidarité entre les générations, l’écart des niveaux d’éducation et d’ambition entre jeunes et Seniors nourrit la frustration des premiers en alimentant le dépit des seconds. Un ajustement générationnel est donc inévitable qu’il convient résolument d’encourager.

Ensuite, la réclusion des femmes n’est plus tolérable. Elles représentent 49,6% de la population nord-africaine et 50,1% de la population sub-saharienne : il y a donc bien une parité démographique : mais c’est tout ! Longtemps confinées aux tâches de production (80% du vivrier alimentaire) et de reproduction (taux de fécondité de 4,7), les femmes tiennent toujours une place insubstituable dans la société actuelle. Or, leur statut juridique reste verrouillé en-deçà de l’acceptable : à cet égard, les avancées réalisées par le Maroc dans le domaine du droit civil ou par le Kenya dans celui du Planning familial doivent être soutenues. Mais en outre, la responsabilité personnelle des femmes est étouffée par leur exclusion de l’éducation : 40% des filles ne vont pas au collège, et cela monte jusqu’à 70% au Soudan ou en Centrafrique. 9 des 10 pays ayant le plus faible taux d’accès des filles à l’école sont situés en Afrique, le seul pays extérieur au continent étant l’Afghanistan. Cette situation interdit aux femmes toute maîtrise de leur vie d’adultes. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si le taux de fécondité atteint 7,6 au Niger, pays qui maintient le plus les femmes dans l’ignorance et l’obscurantisme. Or, cette ségrégation détruit 50% du capital humain dont l’Afrique a le plus grand besoin : ce n’est pas tenable et l’on voit mal comment redresser la situation sans transiter par une phase contraignante de discrimination positive.

Enfin, le creusement des inégalités ralentit voire asphyxie le progrès. Tout processus de développement passe nécessairement par une phase d’étirement social, source d’inégalités. Mais, tout est une question de mesure… Combattre la pauvreté justifie de focaliser l’effort sur le pied de la courbe sociale : c’est l’inclusion sociale. Mais, faire progresser la société réclame de considérer l’ensemble du spectre social : c’est la cohésion sociale. Aujourd’hui en Afrique, il faut passer de l’inclusion à la cohésion sociale car les inégalités sont trop criantes et arrogantes. Le coefficient de Gini quantifie les inégalités sur une échelle allant de 0 (égalité parfaite) à 1 (inégalité intégrale). L’Afrique se situe à 0,43 quand la France est à 0,29. 10 des 19 pays les plus inégalitaires au monde sont situés en Afrique, dont la locomotive sud-africaine. Enfin, doit émerger une classe moyenne africaine plus forte. On l’estime aujourd’hui à 14% de la population : c’est 20% en Inde et 30% en Chine. Or, c’est la classe moyenne qui affermit le progrès à mesure qu’évoluent ses intérêts : sa vision à court terme s’allonge vers le moyen terme, sa consommation se développe, son besoin de services se sophistique, son désir de stabilité s’accroît, sa volonté de transmission s’affirme. C’est aussi grâce à elle que se forment des embryons d’opinion publique. Une classe moyenne forte et rassurée est donc un puissant facteur de progrès : l’affermir constitue un objectif en soi.


- L’Afrique ne maîtrise pas sa démographie.

Il est sans doute paradoxal de n’avoir pas débuté mon propos par ce point, mais je le traite in fine car cette question est aussi décisive que les réponses à y apporter.

Au début du présent siècle, la part de la population africaine dans la population mondiale valait ce qu’elle était au mitan du XVIIIème siècle, soit 13%. Avec 1,3Md de personnes, cette proportion est aujourd’hui passée à 17%. L’on évalue la population africaine à 2,5Mds en 2050 et à 4,4Mds en 2100, soit 1 Terrien sur 4 et 1 jeune sur 3. Cela veut dire que l’exception africaine tient autant à la dynamique de sa démographie qu’à son poids relatif, surtout sur une Planète dont le nombre d’habitants tend à devenir plus stable – indice de fécondité moyen à 2,1 – plus mûr – 20% de la population de +65 ans en 2050, et même 26% dans l’OCDE – et plus concentré – 50% de l’Humanité vit et vivra dans 7 pays : la Chine, l’Inde, les États-Unis, l’Indonésie, le Brésil, le Pakistan et le Nigeria.

Cette préoccupation est donc planétaire, mais elle est parfois difficile à faire partager par les dirigeants africains qui rétorquent, à juste titre, que l’Afrique reste un continent plutôt vide : la densité de population y est, en effet, de 43 hab/km2 contre 150 en Chine, 231 en France, 348 au Japon ou 455 en Inde. Sortir de ce dilemme requiert de répondre à trois questions précises : la croissance démographique africaine est-elle exponentielle ; peut-on maîtriser le flux de cette population, donc la fécondité ; et peut-on gérer le stock, donc la migration ?

L’Afrique est le seul continent au monde à n’avoir pas encore accompli sa transition démographique, c’est-à-dire à être passé d’un régime de fécondité et de mortalité élevées à un régime de fécondité et de mortalité faibles, avec un déséquilibre intermédiaire résultant de ce que la natalité décroît moins vite que la mortalité. Avec « l’après Baby Boom », les pays développés ont réalisé leur transition démographique ; l’Amérique latine également ; l’Asie l’achève. La transition démographique africaine, elle, sera plus lente (80 ans au lieu de 50) et plus tardive (2030-2050). Par suite, le dividende démographique – c’est-à-dire le surplus de croissance attendu de la baisse de fécondité et de la modification de la pyramide des âges – ne sera perçu que plus tardivement. C’est regrettable, mais il semble illusoire de prétendre influer sur des tendances aussi lourdes.

En revanche, avec un taux médian de fécondité de 4,7 pouvant monter jusqu’à 7,4, la régulation des naissances constitue un levier d’action inexorable. Pour l’actionner, il convient de : élargir l’accès des femmes à l’éducation, notamment à l’enseignement secondaire ; proposer une offre de santé et de protection sociale adaptée (accompagnement des jeunes filles, protection maternelle et infantile, systèmes de retraite) ; encourager une évolution consistante et pérenne des normes sociales applicables à la famille. Tout ceci ne se décrète pas car tout cela provoque les tensions les plus vives : l’on touche, en effet, au plus profond de l’intime comme au plus sensible du sociétal. Mais, si un effort significatif de planning familial n’était pas consenti, l’on voit mal comment éviter le recours à des solutions plus contraignantes – pour les hommes comme pour les femmes – nonobstant les lourdes questions éthiques qu’il ne manquerait pas de soulever.

Enfin, une multitude désœuvrée enserrée dans de grandes conurbations anarchiques ou perdue dans d’immenses campagnes en jachère conduit à l’exclusion et force à l’émigration. C’est le cas, et ce le sera davantage encore, du fait de la pression humaine, du manque d’emplois et du dérèglement climatique. A l’instar de Stephen Smith, certains prédisent que la jeune Afrique se mettra en route vers le vieux continent de façon massive et durable. Soyons clairs : les migrations sont d’abord et avant tout intra-africaines. En 2017, 20M personnes ont quitté leur pays pour émigrer vers d’autres états africains : l’Afrique du Sud, la Côte d’Ivoire (à partir du Burkina Faso), l’Ouganda, l’Éthiopie et le Nigeria. D’ailleurs, des émeutes entre communautés éclatent là où le « seuil de tolérance » est dépassé, notamment en Afrique du Sud, et le fait que les Médias en parlent peu n’efface rien aux situations qu’elles révèlent ni aux difficultés qu’elles expriment. Par-delà ces flux intra-africains, le surplus d’émigration concerne aussi, bien sûr, l’Europe et, plus subsidiairement, l’Asie et l’Amérique du Nord. En France, l’INSEE vient de publier des données actualisées desquelles il résulte qu’avec 6,5M de personnes, les immigrés représentent 9,7% de la population. 46,1% sont d’origine africaine, essentiellement du Maghreb (Algérie, Maroc et Tunisie) puis, dans une moindre mesure, d’Afrique subsaharienne : Sénégal, Côte d’Ivoire, Cameroun, Congo, Mali et Guinée. Les réfugiés, quant à eux, proviennent de l’Est plus que du Sud : Albanie, Géorgie ou Afghanistan. En 2017, 32.000 personnes ont obtenu un titre de séjour grâce au droit d’asile. Quant aux motifs d’émigration vers la France, elles tiennent – par ordre décroissant – au regroupement familial, aux études, aux causes humanitaires et à la recherche d’emplois. Le débat sur l’immigration est suffisamment dans l’actualité pour que je ne m’y étende pas davantage. Mais, il est évident que les questions posées par ce débat devront trouver une réponse conforme à nos valeurs autant qu’à nos intérêts. Quant au cadre juridique, il gagnera beaucoup à être stabilisé et appliqué dans la durée plutôt que sans cesse réformé au gré d’une actualité versatile.


Un dernier point : l’amalgame entre les immigrés en situation irrégulière et les résidents en situation régulière doit être évité en général, et plus spécifiquement encore vis-à-vis de l’Afrique. Tout d’abord, pour des raisons politiques et juridiques évidentes : les situations n’ont rien de comparables entre elles. Ensuite, pour des raisons économiques tenant à ce que certains appellent « l’immigration choisie ». Enfin et surtout, parce que la diaspora constitue une chance inestimable pour l’Afrique : elle est une source essentielle de financement du continent grâce aux transferts d’épargne auxquels ses membres procèdent régulièrement : ils représentaient près de 50Mds$ en 2018… L’Union africaine (UA) s’est d’ailleurs structurée en plusieurs régions : 5 sont géographiques auxquelles s’ajoute une région diasporique que l’organisation considère, à juste titre, comme une zone en soi.

Il reste que la démographie africaine va continuer de croître, que les migrations ont peu de chances de se tarir et que, par suite, l’effort principal doit porter sur l’ajustement sociétal afin que les familles accèdent à la maîtrise de leur vie pour que leurs pays accèdent à celle de leur capital humain.


En conclusion, je souhaiterais rappeler la conviction que j’ai exprimée en introduction : l’Afrique ne vit pas hors sol, elle est à nos portes et occupe avec nous la Planète, notre Planète.

L’interdépendance si caractéristique de ce début du XXIème siècle nous convainc qu’une part de notre avenir se joue aussi en Afrique. C’est donc notre responsabilité – collective comme individuelle – de faire en sorte que le dialogue entre l’Europe et l’Afrique soit éclairé par cette intime imbrication de destins.

J’appartiens à une génération dont la vision cosmologique reposait sur un homme fini habitant un monde infini : l’existence n’était pas si longue, mais le progrès ouvrait d’inépuisables perspectives. C’est l’antipode qui prévaut désormais puisque l’homme prétend à l’infini, mais dans un monde qui, lui, devient fini : le transhumanisme nous fait miroiter l’immortalité tandis que nous éteignons peu à peu les richesses de notre Planète.

S’il se vérifiait, ce renversement ontologique constituerait une épiphanie pour le continent africain : des hommes pour qui la vie serait enfin un moindre fardeau dans un continent qu’accableraient d’anthropiques fléaux.

Pour tous ceux qui aiment l’Afrique – et nous aimons l’Afrique ! – nous savons donc à quoi consacrer nos efforts pour demain…

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